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Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation de l'Allier
 

                                 Famille COGAN   

 

            Avant la guerre Joseph COGAN  né le 1erjanvier 1903 à Kichineff (Russie) et son épouse  Jeannette  née Céorna COHN   le 5 mai 1903 à Jassy (Roumanie) sont domiciliés 54, rue Arago 

à Saint-Ouen (Seine).

En 1939 Joseph  s’engage pour la guerre, mais n’est pas appelé.        

Jeannette Cogan Joseph Cogan Fanny Cogan


Sources des photos : 1) Jeannette- Archives Municipales de Broût-Vernet 2) Joseph- Transmise par Gaby COHEN 3) Fanny- Collection Klarsfeld-FFDJF.


        Joseph, Jeannette et Fanny sont parmi les premiers à arriver à Broût-Vernet en janvier 1940. 

Joseph qui a fait H.E.C. (Hautes Etudes Commerciales) est employé comme comptable à la Maison d’Enfants de Broût-vernet. Son épouse Jeannette occupe les fonctions de lingère.     



Source : Archives Municipales de Broût-Vernet



Le 30 juin 1941 étant de nationalité russe il est arrêté par la gendarmerie d’Escurolles sur ordre du préfet par mesure administrative suite à la rupture du pacte germano-soviétique et doit  se déclarer « russe blanc et tout à fait ennemi du régime soviétique ». Il est conduit à Vichy et relâché à une date non connue.


Mais il sera rentré à temps pour signer l’acte de naissance de son fils Albert né  le 21 juillet 1941.


Le 1er octobre 1942 Fanny entre à l’école de Broût-Vernet


Source : Registre de l’école primaire de Broût-Vernet



Donc malgré toutes les incertitudes, toutes les angoisses la vie continue, rythmée    par les événements heureux : naissance d’Albert, entrée à l’école de Fanny, le mariage d’Henry DYBNIS et Miriam WEICHSELBAUM le 26 mars 1943à Broût-Vernet. Joseph sera le témoin et Fanny la petite fille au bouquet.

Des mauvaises nouvelles aussi parviennent à Broût-Vernet : arrestations ou décès des parents, des enfants.

 

Puis arrive le jour fatidique, le 2 novembre1943,  Joseph COGAN et ses deux enfants Albert et Fanny ainsi que les  deux frères FULOP, Roland et Claude,  sont arrêtés au Château des Morelles. Joseph avait été prévenu par un gendarme, mais il n’avait pas voulu partir, il n’avait pas voulu abandonner son épouse qui accouchait à Vichy. Alors ils s’étaient cachés dans un vaste placard sous l’escalier qui monte aux étages. Mais selon Danial KOGAN ils ont été dénoncés par une aide cuisinière.  Ils sont tous les cinq internés à la Mal-Coiffée, prison militaire allemande à Moulins. 

Alors que la famille COGAN  et Louis FULOP partent vers Drancy, les deux frères FULOP sont relâchés grâce à leur belle-mère Anna qui « se fait passer pour catholique ». Louis FULOP en tant que conjoint  d’ « aryenne » ou supposée telle ne sera pas déporté. Il  va travailler à la gare de l’Est. Il entasse dans les wagons en partance pour l’Allemagne le butin accumulé par les nazis au cours de leur pillage des maisons juives.

        Joseph et ses enfants sont transférés à Drancy le 16 novembre 1943 et sont déportés  à Auschwitz le 7 décembre dans le convoi N° 64.

Photo transmise par Gaby Cohen

        Au moment de l’arrestation Jeannette accouchait à Vichy d’un petit garçon prénommé Daniel. Gaby COHEN née WOLFF, éducatrice à Broût-Vernet en 1943 surnommée Niny,  témoigne : « Je suis allée le (bébé) voir à Vichy et raconter « des mensonges » à Jeannette, sa maman, pour lui cacher l’arrestation de son mari et de ses deux enfants chéris. Les Allemands qui au moment de l’arrestation de Joseph Cogan tenaient à arrêter également Jeannette ont demandé aux responsables de la Maison et aux personnes d’alentours si on pouvait la chercher et qu’on leur donne les endroits possibles où elle pouvait se trouver. Ne recevant pas de réponse ils ont promis de revenir. Parla suite ils ont fait savoir qu’ils allaient rendre Fanny et Albert si on leur communiquait l’adresse de la mère. J’ai été envoyée (sur ma bicyclette) à Vichy où des personnes que je connaissais proches du gouvernement Pétain nous ont vivement déconseillé de donner la moindre information. « Ils n’allaient pas rendre les enfants ! ».

          Jeannette et Daniel reviennent ultérieurement à Broût-Vernet et vont difficilement subsister. Le 1erjuin 1945 une carte d’alimentation portant le N° 332 est attribuée à Daniel.Ils vont repartir dans la région parisienne et émigrer en 1947 en Australie où Daniel deviendra un peintre de renom.



Œuvre de Danial Kogan représentant la souffrance de sa mère et intitulée Unresolved grief /Douleur sans réponse


Danial Cogan et sa mère

Danial et sa maman : transmis par Danial



Sources :

- Archives Départementales de l’Allier 996 W 122.01, 194.01, 254.02, 1289 W 65.2,

- Archives Départementales du Puy-de-Dôme 908 W 536

- Archives de la famille

- Archives Municipales de Broût-Vernet

- Mémorial des Enfants Juifs Déportés de France Serge Klarsfeld FFDJF octobre 1994

- Témoignage de Gaby Cohen née Wolff

- Témoignage de Danial Kogan

 

© AFMD de l’Allier


Danial Kogan (DanielCogan)

né à Vichy le 30 octobre 1943

Poèmes lus  le 9 mai 2010

en anglais par M.Fred ROSE

et en français par Mme Viviane Cogan

lors de l’inauguration, par le Préfet de l’Allier,

de la stèle érigée en hommage aux enfants juifs des Morelles et

en particulier à son père Joseph, à sa soeur Fanny et à son frère Albert

arrêtés le 2 novembre1943 aux Morelles et morts en déportation

 

Version en français

 

Voici ce que je sais de Fanny, ma sœur

 

tu riais beaucoup

ton Papa t’adorait et te gâtait

il te faisait rire

tu as été la petite fille au bouquet pour tes professeurs, Miriam et Henri

tu as suivi l’exemple de ton Papa et tu es restée calme

quand la police vous a regroupés devant les enfants

tu as été livrée à la Gestapo et internée dans le camp de Drancy

tu y as eu tes sept ans

tu as été jetée dans le wagon à bestiaux qui a mis trois jours pour arriver à Auschwitz

en arrivant à Auschwitz tu as été gazée avec les 105 autres enfants

peut-être es-tu morte dans le train

il n’y a pas d’autre trace de toi

que ton esprit qui a accompagné  ta mère jusqu’au jour de sa mort à l’âge de quatre-vingt

douze ans.

 

Voici ce que je sais d’Albert, mon frère

 

tu avais un ami qui s’appelait Emile.

 

Voici ce que je sais de Joseph Cogan, mon père

 

Tu adorais les films de Charlie Chaplin et le fromage de Roquefort

tu fumais 40 cigarettes par jour

tu étais né dans une famille riche et ultra orthodoxe  dans la Russie tsariste

ils mangeaient dans des assiettes en or à Pessah

leur fortune a disparu avec la révolution

ceci t’a libéré

tu as étudié à Bucarest, Vienne et Paris

tu es devenu comptable et tu étais le propriétaire d’une affaire de cuir en gros

tu étais aussi  socialiste et tu as épousé une femme du prolétariat

avec de fortes aspirations

tu as été un administrateur compatissant

le gendarme du coin,un ami, t’a dit que ta famille serait arrêtée dans deux jours

tu as choisi de rester ton frère t’avait supplié de venir en Suisse

tu n’as pas pu quitter ta femme  et ton bébé qui venait de naître

on vous a trouvés toi et tes enfants cachés dans un placard

tu as été trahi par une aide-cuisinière employée à temps partiel

tu as dû supporter de vivre encore sept mois après que Fanny et Albert aient été gazés.

 

Soixante sept ans après la mort de trois membres de la Colonie cette plaque rappelle leur

souvenir. Honneur leur a été rendu.

 

Merci.

 

Danial Lalor Kogan

 

 

Version en anglais

 

This is what I know of Fanny, my sister.

 

you giggled a lot

your daddy adored and spoilt you

he made you laugh

you were a flower girl for your

teachers, Miriam and Henry

you followed your daddy's lead and remained calm when assembled by the police in

front of all the children

you were handed to the Gestapo and put into the detention camp of Drancy

you had your seventh birthday there

you were put on a cattle train that took three days to reach Auschwitz

on reaching Auschwitz you were gassed with the other 105 children

may be you died on the train

there is no further record of you

except that your spirit remained with your mother until the day she died at ninety two years of age.

 

This is what I know of Albert, my brother.

 

you had a friend called Emile.

 

This is what I know of Joseph Cogan, my father

 

you loved Charlie Chaplin movies and Roquefort cheese

you smoked 40 cigarettes a day

you were born into a wealthy ultra orthodoxfamily in Czarist Russia

they ate off gold plates at pesach

their wealth vanished in the revolution

this liberated you

you studied in Bucharest,Vienna, and Paris

you became an accountant and owned a leather whole sale business

you were also a socialist who married a woman of the proletariat with strong

aspirations you were a compassionate administrator

the local policeman, a friend, told you that your family would be arrested in two days

you chose to stay

your brother had begged you to come to Switzerland

you could not leave your wife and new born baby

you and your children were found hiding in a cupboard

you were betrayed by a part-time kitchen hand

you had to endure seven months of living after Fanny and Albert were gassed.

 

Sixty-seven years after the death of the three members of la colony, this plaque

commemorates their memories. Their lives have been honored.

Thank you.

 

Danial Lalor Kogan