Hélène FENSTER écrit «Le voyage dure 4 jours, 3 nuits: pas de place pour s'allonger, la tinette située au milieu du wagon est très rapidement pleine et déborde!! Elle est vidée une fois par jour.
Arrivée le 3 août 1944 le soir vers minuit à Birkenau.
Le train s'arrête, on ouvre les portes du wagon à bestiaux, aux cris «Raus! Laissez vos affaires!», répétés jusqu'à ce que le dernier voyageur soit descendu. Nous sommes hébétés. Où sommes-nous?
Pour moi très vite c'est le gouffre. Il fait noir, au loin des fils de fer barbelés, des lumières, des projecteurs braqués sur nous, on ne discerne rien, des cris, des bousculades. Je ne connais personne. Où suis-je? Tout à coup je me retrouve dans une colonne épaisse, une marée humaine, des femmes uniquement, entourée par les S.S. allemands et des hommes costauds, en habits rayés, hurlant, nous faisant avancer vers le «comité d'accueil»: Mengele et ses aides S.S. Tout va très vite: à gauche, à droite et on avance dans le gouffre.»
Elle fait partie des 283 femmes sélectionnées pour le travail, déshabillées, rasées, douchées, tatouées le 3ème jour. Pour Hélène ce sera le matricule A.16711.
Elle va passer trois mois à Birkenau: lever à 4 ou 5 heures le matin, appels en rang par 5, corvées, sélections.
« Le moral sera relativement bon pour plusieurs raisons: nous sommes arrivées à Birkenau après le débarquement des Alliés en Normandie (6 juin 1944); de plus on entend les canons! Les Russes sont à 40 km, les nouvelles nous parviennent par les Kommandos extérieurs, les fausses nouvelles aussi!!
Le physique pas trop délabré au début (…), mais petit à petit la faim nous torture, impossible de garder un bout de pain pour le lendemain, la faim creuse, et aussi le risque qu'il soit volé pendant la nuit».
Le 27 octobre après une dernière sélection devant MENGELE c'est le départ pour le camp de Gross Rosen. Au bout de trois jours c'est l'arrivée au Kommando de Kratsau situé dans les Sudètes en Tchécoslovaquie. Au début elle effectue des corvées dans la cour, puis travaille dans l'usine de munitions par équipes, une semaine de jour, une semaine de nuit.
«L'enfer de Kratzau a duré 7 mois.
Enfin dans la matinée du 9 mai 1945 (un jour après la signature de l'armistice), les soldats russes nous ouvrent les portes et les grilles du camp. Et voilà environ 1000 femmes livrées à elles-mêmes. Pas de gardiens SS ni de soldats russes, mais des femmes affamées, ivres de joie et de liberté».
Le retour va durer 15 jours avant d'arriver en France à Sarreguemines le 27 mai 1945.
A Paris elle est hébergée par la famille SPRUNG qu'elle avait rencontrée à Vichy.
Au bout de deux mois elle rouvre le magasin de sa mère qui n'est pas rentrée de déportation. Son frère non plus.
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